Cet article s’inscrit dans la continuité du dossier relatif aux critères de validité en sciences humaines et sociales. Après avoir délimité le sujet et les concepts, il importe de choisir une méthodologie appropriée pour observer la réalité étudiée.
Dans cet article, nous présentons différentes méthodes de recueil de données en sciences humaines et sociales. Il ne s’agit pas d’une liste exhaustive, ni d’une présentation détaillée de chacune de ces démarches, mais d’un aperçu de leurs logiques et champs d’application. De plus, nous n’approfondissons pas les implications en termes de traitement des données générées par ces modalités de collecte.
Expliquer ou comprendre ?
Le philosophe Wilhelm Diltey distingue l’explication (le fait d’exposer les causes d’un phénomène) de la compréhension (le fait d’exprimer les raisons de ce phénomène).
Concrètement, au niveau des sciences humaines et sociales, expliquer une réalité consiste à en rechercher les causes (par corrélations statistiques, notamment), tandis que comprendre cette réalité consiste à interroger les raisons des acteurs (herméneutique).
En parallèle à cette réflexion, il est courant de distinguer deux types de méthodes en sciences sociales : celles dites quantitatives et celles dites qualitatives. Les premières consistent à mesurer un phénomène avec des chiffres, tandis que les secondes s’appliquent à en rechercher les différentes significations. En général, des méthodes quantitatives sont donc plus propices à mettre en évidence des causes et des méthodes qualitatives le sont davantage en ce qui concerne la compréhension des raisons des acteurs.
En guise d’illustration, certains paradigmes de sociologie des réseaux sociaux (cf. MERCKLE, P., Sociologie des réseaux sociaux, Paris : La Découverte, 2011) proposent une analyse principalement quantitative de ces réseaux. Cette analyse se construit sous forme de graphes schématisant les relations entre différentes entités. Concrètement, il s’agit d’établir des « schémas types » des structures relationnelles observables dans la société, et d’en inférer des « lois », des théories. Ce type de méthodologie souligne par ailleurs l’importance de définir des unités d’observation (ici, des « schémas » relationnels) pour observer des régularités statistiques. Dans son ouvrage, Mercklé montre en effet que la seule notion de réseau prête à discussion : les unités du réseau sont-elles les entités qui les composent ou les relations entre elles ? A partir de combien de relations y a-t-il réseau ?
Pour une illustration de méthodologie qualitative, lire par exemple l’article suivant : GUILLEMETTE, F., « L’approche de la Grounded Theory ; pour innover ? », in Recherches qualitatives 26 (1), 2006, pp. 32-50.
Le choix d’une optique méthodologique a des impacts sur les instruments de collecte et de traitement des données, notamment en termes d’échantillonnage (cf. infra).
Recensement
Le recensement dresse un panorama d’une réalité sociale, par dénombrement. Sur base de la population ou d’un échantillon de celle-ci, il s’agit de dénombrer si oui ou non les individus possèdent ou non telle ou telle caractéristique. Il s’agit donc d’une méthode quantitative[*].
Afin d’obtenir un recensement valide, il importe de prendre en compte toute la population de référence, ou bien un échantillon représentatif de celle-ci. Pour ce faire, il s’agit soit de sélectionner une grande partie de la population au hasard, soit par exemple d’appliquer la méthode des quotas (qui a pour but de constituer un échantillon ayant les mêmes caractéristiques que la population cible sur base de l’âge, du sexe et autres catégories sociales communes[**]).
Deux illustrations de cette méthode :
- La possession d’un téléviseur. Il est possible de dénombrer facilement ce fait, d’en faire des statistiques, puis d’établir des comparaisons entre lieux géographiques, époques, etc.
- Les audiences télé. En échantillonnant la population, cette fois, la tâche consiste à mettre en évidence des grandes tendances de consommation de la télé. Il est généralement considéré qu’avec un panel de 1000 à 2000 personnes de catégories ciblées, une représentation fidèle du phénomène étudié est obtenue, à quelques pourcent près.
Ces caractéristiques ne permettent pas de comprendre les pratiques ou les choix des individus, mais simplement d’en faire un état des lieux à un moment donné. Il serait d’ailleurs hâtif d’en tirer des conclusions sur les préférences des individus, par exemple. Dans le cas des audiences télé, notamment, ce n’est pas parce qu’une majorité de personnes regarde une émission que ces personnes la trouvent de qualité. D’autres types d’études montrent en effet que si certains programmes recueillent une large audience, ils ne sont pas pour autant fort appréciés des téléspectateurs, qui les regardent avec une certaine distance (du moins, c’est ce qu’ils déclarent).
Pourquoi, dès lors, consomment-ils un programme plutôt qu’un autre ?
Enquêtes, témoignages (traces) et entretiens
La réalité sociale peut également être étudiée à travers des enquêtes, le recueil ou la compilation de témoignages et des entretiens.
Selon qu’il s’agit d’une enquête avec des questions fermées (QCM – oui/non/ne se prononce pas) ou d’un entretien ouvert, les critères de représentativité et l’échantillonnage sont très différents.
Dans le premier cas, comme lorsqu’il est question de sondages ou de recensement, il importe d’avoir une vision large de la population. C’est la quantité de répondants qui va donner une valeur aux pourcentages et proportions qui ressortiront de l’enquête.
Dans le second cas, ce sont les différences qualitatives qui importent. Dans une méthodologie basée sur des entretiens, l’échantillon est considéré comme complet lorsque l’entretien n+1 n’apporte pas d’information significative supplémentaire par rapport aux n entretiens qui le précèdent. L’échantillon est dit « saturé », c’est-à-dire que l’on considère qu’il contient déjà toutes les informations qu’il pourrait contenir.
Une des limites de ce type de méthodes tient au fait qu’elle se base sur du déclaratif.
« […] on ne sera jamais assuré ni de la sincérité, ni de la fidélité, ni de la compréhension, ni de la compétence des répondants »
JAVEAU, C., L’enquête par questionnaire : manuel à l’usage du praticien, 4ème édition revue, Bruxelles : Editions de l’Université de Bruxelles, 1990, p. 24.
Un frein majeur à cette méthode est qu’elle implique fortement la subjectivité du répondant. En corollaire, elle peut être particulièrement indiquée lorsque l’on cherche à rendre compte de certaines réalités subjectives des individus. Elle suppose non seulement la sincérité de ceux-ci, mais également leurs compétences à raconter, à comprendre et à donner du sens à leurs propres pratiques. Par exemple, si les pratiques des individus correspondaient effectivement à ce qu’ils déclarent dans des enquêtes relatives à la confiance envers les médias (Baromètre Kantar TNS – La Croix, notamment), Arte serait la chaîne de télévision la plus regardée de France, il y aurait plus de journalisme de « bonnes nouvelles », moins de sensationnalisme ou encore moins de téléréalité (A ce sujet, lire notamment cet article sur Slate, celui-ci dans La Libre, celui-ci dans La Croix ou encore ce résumé de mon premier ouvrage)…
> Mise à jour 2018 : lire aussi La confiance dans les médias : commentaires de l’enquête Kantar – La Croix 2018
En conséquence, pour C. Javeau, l’utilisation des entretiens « mérite qu’on se livre […] à une vigoureuse critique épistémologique » (Op. cit., p. 25).
Pierre Bourdieu souligne une balise supplémentaire applicable aux pratiques consistant à interroger des individus. S’attaquant spécifiquement aux sondages d’opinion, il fait remarquer que ceux-ci ne représentent pas une opinion publique qui serait homogène :
« Par exemple, on met en question la représentativité des échantillons. Je pense que dans l’état actuel des moyens utilisés par les offices de production de sondages, l’objection n’est guère fondée.
On leur reproche aussi de poser des questions biaisées ou plutôt de biaiser les questions dans leur formulation : cela est déjà plus vrai et il arrive souvent que l’on induise la réponse à travers la façon de poser la question. […] Il y a toutes sortes de biais de ce type et il serait intéressant de s’interroger sur les conditions sociales d’apparition de ces biais. La plupart du temps ils tiennent aux conditions dans lesquelles travaillent les gens qui produisent les questionnaires. Mais ils tiennent surtout au fait que les problématiques que fabriquent les instituts de sondages d’opinion sont subordonnées à une demande d’un type particulier ».
BOURDIEU, P., « L’opinion publique n’existe pas » (exposé fait à Noroit (Arras) en janvier 1972), Les Temps modernes n°318, janvier 1973, pp. 1292-1309.
Le simple fait de poser des questions sur un thème choisi en fonction d’un angle choisi comporte déjà des biais : même si le chercheur tâche de rester le plus extérieur possible, il attire déjà bien l’attention sur des phénomènes qu’il délimite d’une certaine manière. Au-delà de la « mise à l’agenda » de ces thèmes du point de vue politique ou idéologique à laquelle participent sciemment ou non les instituts de sondages, ces problématiques se retrouvent au niveau du chercheur.
De manière concrète, ces biais peuvent être relativement contrôlés à travers l’exercice d’une vigilance lors de la réalisation des questions.
Dans le cas de choix multiples, il est primordial par exemple de lister toutes les réponses possibles, et éventuellement de prévoir une case « autre(s) (avec demande de précision si pertinent) » ou encore « sans avis ».
Dans le cas de questions ouvertes, là aussi, il importe de ne pas induire les réponses, y compris dans les questions de relance (également à construire à l’avance).
Lorsque ces questions ouvertes portent sur les pratiques des personnes, il est intéressant de demander aux individus de décrire ce qu’ils font, comment ils le font, et pour quelles raisons ils le font de cette manière et pas autrement. Il s’agit véritablement de susciter un récit. Cela implique une posture « naïve » de la part du chercheur.
Le fait d’induire un récit a du sens lorsqu’il s’agit de comprendre les raisons des acteurs, comment ils justifient leurs pratiques, leurs relations, comment ils y mettent du sens, et selon quelles valeurs.
En guise d’illustration, nous avons vu ci-dessus que les audiences télé montrent ce que les individus regardent. Avec une méthodologie basée sur des entretiens ou enquêtes, il est possible d’interroger les raisons de leur consommation. Les entretiens peuvent porter sur ce que les personnes déclarent penser des émissions de télé, et permettre de comprendre pourquoi ils choisissent de consommer une émission plutôt qu’une autre. Leurs réponses peuvent informer à propos de ce qu’ils considèrent important, sur les fonctions et les rôles qu’ils s’attribuent ou attribuent à leurs actes. Il est alors possible de voir que certains contenus sont plus valorisés que d’autres (par exemple, des émissions dites « culturelles » sur Arte), tandis que d’autres le sont moins (par exemple, des émissions de télé réalité). Ces observations peuvent apparaître paradoxales lorsqu’on les met en relation avec la consommation effective des émissions : comment les individus le justifient-ils ?
Observation participante
La notion d’observation en sciences fait en général référence à la prétention à une certaine objectivité : l’observateur serait le plus possible « extérieur » à la réalité observée, son « objet » d’étude. L’objet d’étude existerait indépendamment de lui.
A contrario, le terme « participation » réfère à l’idée d’un sujet actif, qui prend part à la réalité sociale.
Ces deux termes peuvent paraître antagonistes. Dans plusieurs méthodologies de collecte, le chercheur tâche en effet de minimiser l’impact de sa présence sur les données recueillies (par exemple, en n’influençant pas les réponses d’un questionnaire).
Cependant, il est relativement bien admis que le simple fait de prétendre observer d’une manière « objective » est déjà un positionnement qui a des impacts sur la construction des connaissances. Autrement dit, que le simple fait d’observer est déjà une participation active : cela repose sur des choix et des perspectives bien précises.
A fortiori, dans le champ des sciences humaines et sociales, il est parfois difficile d’isoler le chercheur de la réalité sociale qu’il souhaite observer : il fait partie de cette réalité. Ainsi, lorsqu’un chercheur va observer les pratiques d’une tribu, par sa seule présence il risque d’influencer les comportements des individus de cette tribu. Un parallèle peut être établi avec des émissions de télé réalité : par le simple fait que les personnes sont enfermées dans un certain cadre et filmées, elles risquent de se comporter différemment que dans leur « vrai » quotidien.
Plus encore : dans certains cas de figure, il peut être réducteur d’interpréter des coutumes, des pratiques ou des croyances à partir d’un regard extérieur. Nos catégories mentales peuvent ne pas correspondre avec celles des populations étudiées. Par conséquent, l’observation participante invite à s’imprégner de la culture de l’autre, à vivre sa réalité de l’intérieur.
Cette méthode demande du temps afin de gagner la confiance des populations étudiées, de « se fondre » dans leur quotidien et de « faire oublier » le dispositif d’observation. Cela demande une participation adéquate. En outre, cela demande une rigueur afin de garder une posture d’observation, notamment par la prise de notes régulière.
Cette méthode peut être couplée à des entretiens et autres questionnaires. Elle a une pertinence quand il s’agit de rendre compte de pratiques, usages, rituels et coutumes, surtout lorsque ceux-ci sont étrangers à l’observateur. Cette posture impliquant un fort engagement pour le chercheur, elle suppose une énorme vigilance pour garder une « juste distance » avec son sujet d’étude.
Méthodes expérimentales ou quasi-expérimentales
Certaines observations peuvent se faire en situations plus ou moins contrôlées, parfois même en laboratoires, afin d’évaluer l’impact d’un élément sur un autre élément, par exemple. Cela correspond aux méthodes expérimentales, ou quasi expérimentales.
« Une quasi-expérimentation […] peut impliquer toute une série de situations dans lesquelles certaines personnes sont exposées à un événement ou une intervention et d’autres ne le sont pas, et dans lesquelles on peut déterminer ce qui arrive après l’intervention […]
Dans une expérimentation de terrain, on est capable de contrôler (habituellement par assignation aléatoire) qui est exposé à l’intervention et qui ne l’est pas ».
JONES, R. A., Méthodes de recherche en sciences humaines, Bruxelles : De Boeck Université, 2000, p. 207.
Afin de réaliser des observations adéquates à travers un tel dispositif, il importe de définir des variables (dépendantes et indépendantes) et d’isoler ces variables (c’est-à-dire de les délimiter et les contrôler suffisamment pour s’assurer que des éléments extérieurs au dispositif ne viennent pas influencer leur mesure). Leon, Cambon et al. (1977) définissent les différentes variables comme suit :
« On appelle variables indépendantes (VI) les faits que l’expérimentateur manipule (c’est-à-dire fait varier) de façon contrôlée, pour pouvoir mesurer les effets de ces variations. On appelle variables dépendantes (VD) des faits dont la modification est fonction (dépend) de celle introduite au niveau des variables indépendantes ».
LEON, A., CAMBON, J. & al, Manuel de psychopédagodie expérimentale, Paris : PUF, 1977, p. 86.
Si possible, ce type d’expérimentation se fait avec un groupe témoin, c’est-à-dire un groupe dans lequel la variable indépendante n’est pas manipulée. Concrètement, il s’agit de limiter – ou du moins d’évaluer – les potentiels « effets placebo » : si le même changement arrive dans un groupe qui n’a pas été exposé à un événement (par exemple, la prise d’un médicament) que dans un groupe qui l’a été, il se peut que ce ne soit pas l’événement en tant que tel qui soit la cause de ce changement, mais simplement le dispositif en tant que tel (le fait d’avaler une gélule, même si celle-ci ne contient que de l’eau).
Plusieurs expériences de psychologie sociale ou apparentées (ex. : expérience de Milgram et expérience de Asch, expérience de Jane Eliott (en), expérience de Zimbardo – la prison de Stanford, etc. – cf. mon cours d’introduction à la psychologie sociale) correspondent à des applications plus ou moins élaborées de ce type de dispositif.
> Mise à jour 2018 : lire aussi Retour – décevant – sur l’expérience de Milgram (Sussan, R., InternetActu, 2018), ainsi que ces perspectives et écrits intéressants à propos de la validité des sciences humaines, psychologiques et sociales : L’expérimentation psychologique en crise (Sussan, R., 2016), L’effondrement de la psychologie sociale – Slate.com (Guillaud, H., 2016).
> En particulier, concernant les célèbres expériences de Milgram et Zimbardo : Critiques de l’expérience de Zimbardo (Wikipédia) – Le Textier, T., Histoire d’un mensonge. Enquête sur l’expérience de Stanford (2018), Revisiting Milgram’s obedience experiment : what did he actually prove ? (2013), L’art de l’électrochoc : les mensonges de l’« expérience de Milgram » (2014).
J’ai utilisé une méthodologie similaire dans mon mémoire (2009).
Ce type de démarche a une pertinence lorsqu’il s’agit par exemple de mesurer les impacts d’un dispositif sur des pratiques, usages ou encore croyances d’un individu. Comment réagissent-ils lorsqu’ils sont exposés à tel ou tel événement ? Quel impact cela a-t-il sur leurs comportements ?
Une des limites de cette méthode tient au fait qu’elle implique un dispositif généralement factice (le « laboratoire ») : les données sociales sont observées en-dehors de leur contexte « normal ». De surcroit, ceci ne permet en général que d’observer des réactions relativement immédiates, et non sur le long terme. Enfin, cela pose problème d’un point de vue éthique de savoir dans quelle mesure un comportement peut être suscité ou non par un tel dispositif.
Les méta-études et études théoriques
Les études « méta » correspondent à une analyse des études sur un domaine bien précis. Plutôt que d’observer la réalité directement, il s’agit de faire le point en fonction des études existantes sur un sujet donné. Cela est pertinent dans des domaines où il existe déjà beaucoup d’études, et d’autant plus lorsque celles-ci semblent donner lieu à des observations contradictoires (par exemple, lorsqu’il est question des impacts des médias sur la violence).
Une méta-étude ou une étude théorique s’intéresse donc particulièrement à la littérature existante. Plus qu’un état des lieux, non seulement elle collecte et recense les contenus, mais elle les soumet aussi à une critique épistémologique poussée. Il s’agit de mettre en perspective l’ensemble des données en fonction du bienfondé des dispositifs méthodologiques qui sont à leur origine.
C’est donc un examen synthétique des contenus et des méthodes qui remet les observations dans leurs contextes (cf. la notion de perspectivisme). Chaque affirmation est pertinente dans une certaine mesure.
> Quand les données sont collectées, il importe encore de les traiter de manière rigoureuse, cf. Un traitement en contexte(s) et réflexif.
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[*] Voici une autre illustration d’approche quantitative d’un phénomène, dans le cadre de l’étude du traitement médiatique d’une actualité. Il est possible d’obtenir des données numériques précises en comptabilisant le nombre de minutes qui y sont consacrées dans des journaux télévisés, le nombre de unes de presse dans lesquelles cette actualité apparait, ou encore l’espace (surface) qui lui est attribué dans des articles. Il importe dès lors de délimiter un corpus représentatif. J’ai utilisé une méthodologie semblable dans mon étude comparative des programmes de prime time de La Une, RTL TVI et TF1 en 2008.
[**] Dans son ouvrage intitulé Sociologie des réseaux sociaux (2011), Pierre Mercklé expose plusieurs remises en cause de cette manière de procéder : « […] ce que l’analyse des réseaux sociaux reproche à la sociologie traditionnelle, c’est de postuler l’existence de groupes sociaux constitués par agrégation d’individus présentant des attributs similaires en termes par exemple d’âge, de genre, de profession, d’origine sociale, de niveau de diplôme, de lieu de résidence, etc. Ces « groupes » présentent certes l’avantage de « correspondre aux représentations du sens commun » [Degenne, Forsé, 1994, p. 5], mais ils ont […] l’inconvénient d’être construits a priori, si bien que l’analyse consiste alors très souvent à vérifier si ces catégorisations ont du sens, si ces groupes ont une quelconque réalité, dont témoigneraient des pratiques et des représentations semblables […] en réalité une sociologie véritablement « analytique » des groupes sociaux ne peut éventuellement que constater l’existence de tels groupes a posteriori, quand elle a découvert des réseaux de relations entre un certain nombre d’individus […] » (p. 58).
L’auteur approfondit ces considérations et leurs impacts en termes d’épistémologie de la sociologie dans le chapitre « Un nouveau paradigme sociologique ? » (pp. 97-106).